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Le cap Horn sur une mer déchaînée

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L’étoffe des héros

21/03/2010 |

Le Team Groupama 3 fête son record !
Le Team Groupama 3 fête son record ! 

Groupama 3 a franchi la ligne d’arrivée au large d’Ouessant samedi soir. Franck Cammas et ses équipiers établissent un nouveau record dans le Trophée Jules Verne en 48 jours, 7 heures, 44 minutes et 52 secondes.

Le cap Horn sur une mer déchaînée dans loisirs-voyages coeur-Le record de Bruno Peyron et du catamaran Orange 2 aura tenu cinq ans. Samedi, Franck Cammas et l’équipage de Groupama 3 ont inscrit à leur tour leur nom dans la légende de la voile. En 2005, Peyron et ses hommes avaient mis 50 jours pour faire le tour du monde sans escale. Les nouveaux héritiers de Phileas Fogg, le héros imaginaire de Jules Verne, ont franchi la ligne d’arrivée à Ouessant samedi soir après 48 jours, 7 heures, 44 minutes et 52 secondes de navigation. A eux, donc, le trophée du nom du célèbre auteur, imposante coque de bateau flottant sur un champ magnétique et retenue par un câble-amarre. Ses 260 cm de long nécessiteront beaucoup de bras lors de la cérémonie officielle de remise du trophée au Musée National de la Marine. Cela tombe bien, on ne fait pas encore en solitaire le tour de la planète en moins de 50 jours. L’an dernier, Thomas Coville sur Sodeb’O avait mis 59 jours, soit deux de moins que Francis Joyon, le détenteur du record en solo. Cette fois, le Rennais a explosé les compteurs avec Cammas et ses 8 autres coéquipiers.

Pari gagné
«Le défi est osé et l’erreur est fatale mais lorsque ça passe, le sentiment d’avoir franchi un nouveau cap est presque plus fort que la victoire finale», confiait, sur son blog, Coville avant même l’arrivée à Brest samedi. Le barreur fait référence au parti pris par le Team Groupama 3. Celui de concevoir un trimaran plus petit (31,50 mètres) et plus léger (28 tonnes) que ses concurrents. «Par son concept de bateau ultra léger sans s’être orienté vers le gigantisme, Groupama 3 va peut-être redéfinir ce que peut être un bon marin (…) Est-ce savoir affronter les éléments ou savoir les anticiper et les éviter ? Sans doute, faut-il savoir faire les deux mais lorsque le bateau le permet, l’équipage maîtrise la puissance et la technologie», disserte Coville. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les hommes et la machine ont fonctionné en parfaite symbiose durant ce mois et demi de course.

Record dans l’Océan Indien
Parti de Brest le 31 janvier dernier, Groupama 3 n’en était pas à son coup d’essai. Par deux fois, le sort avait anéanti les rêves de gloire de la bande à Cammas. En février 2008, un chavirage au large de la Nouvelle Zélande avait mis fin à la première tentative de l’Aixois. En novembre dernier, une avarie sur un bras de liaison lui coûtait son deuxième essai. A chaque fois, Groupama 3 était en avance sur le temps référence de Bruno Peyron. Rageant. Comme on relance un enfant sur un vélo après une chute, Cammas avait choisi de repartir rapidement. Avec succès cette fois-ci. En retard sur Orange 2 au Cap de Bonne Espérance, Groupama 3 a appuyé sur le champignon dans l’Indien avec un record de la traversée de l’Océan à la clé (8 jours, 17 heures), ce qui lui a permis de franchir le Cap Horn avec 9 heures d’avance. Ralenti par une zone orageuse au large du Brésil, Cammas & co ont ensuite franchi l’équateur la semaine dernière avec 400 milles de retard. Un débours effacé en moins de deux jours grâce à des alizés favorables. La transition avec le flux d’Ouest, qui avait fortement ralenti Peyron et Orange 2 il y a cinq ans, s’est ensuite faite en douceur. A l’image de ce tour du monde où Groupama 3 n’aura finalement pas tellement souffert. Il avait déjà donné.

L’équipage de Groupama 3
Franck Cammas (barreur, skipper)
Jacques Caraës (n°1)
Thomas Coville (barreur)
Stan Honey (Navigateur)
Bruno Jeanjean (n°1)
Ronan Le Goff (n°1)
Loïc Le Mignon (barreur)
Lionel Lemonchois (barreur)
Fred Le Peutrec (barreur)
Steve Ravussin (barreur)

Le Tour du Monde de Groupama 3 en images

 

sport24_363862_6278667_1_fre-FR dans reportage

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* le journal de bord de  Groupama 3

Trimaran Groupama 3 

Dépressions et hautes pressions

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Après les dépressions du Pacifique, voici les hautes pressions de l’Atlantique : Groupama 3 navigue depuis son passage de la Terre de Feu jeudi soir (04.03.2010.), vers une énorme bulle anticyclonique qui décale sa trajectoire vers le Nord-Est. Malgré cela, le trimaran géant conserve un peu d’avance ce samedi matin sur le temps de référence (environ 120 milles), mais en y regardant de plus près, force est de constater que Franck Cammas et ses hommes étaient à la même latitude virtuelle que leurs prédécesseurs, Bruno Peyron et son équipage. Mais par 50° Sud, Orange 2 était il y a cinq ans, dix degrés plus à l’Ouest soit environ 400 milles plus proche des côtes argentines !

Alors que Orange 2 avait rasé l’archipel des Falkland, Groupama 3 est passé vendredi après-midi très au large de ces îles découvertes par les Malouins (le sieur de Beauchesne en 1701) : le trimaran géant s’écarte donc sensiblement de la route directe vers Ouessant et lorsqu’il devra virer de bord en fin de week-end, l’avance sur le temps de référence va se transformer en retard ! Mais si Bruno Peyron et son équipage avaient effectué une fort belle remontée jusqu’au Brésil, la suite avait été moins véloce… Il faut donc s’attendre à une succession de rebondissements et d’incertitudes jusqu’à la ligne d’arrivée. Franck Cammas et ses neuf équipiers sont non seulement préparés à ce challenge, mais en sus, ils en apprécient les subtilités tactiques, comme si cette fin de parcours était une régate virtuelle ! (20.Minutes-06.03.2010.)

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05.03.2010

Entre deux mers

La transition entre le Pacifique et l’Atlantique s’est faite… pacifiquement. Au point que Groupama 3 a été très sensiblement ralenti après son passage du cap Horn à 18h30 TU jeudi : le vent s’est écroulé en passant au secteur Nord et Franck Cammas et ses hommes s’écartent de la route directe.

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04.03.2010

Un océan à avaler

En passant le cap Horn à 18h30 TU ce jeudi 4 mars, Franck Cammas et ses hommes conservent 175 milles d’avance (soit 8 heures 55 minutes) sur le temps de référence. Mais le début de ce final du tour du monde sera compliqué à négocier pour le trimaran géant, du moins pour les premières heures de cette remontée de l’Atlantique…

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Les conditions particulières qui ont régné sur le Pacifique n’ont pas permis à Groupama 3 de s’adjuger le record WSSRC de la traversée du plus grand océan du monde : du vent certes, mais trop, au point d’imposer un grand détour par le Nord pour éviter le plus dur de la mer générée par une méchante dépression. Puis il a fallu à Franck Cammas et ses hommes négocier une zone de transition plutôt molle avant d’aborder les côtes chiliennes… Au final, l’équipage a avalé près de 5 000 milles sur l’océan Pacifique (Sud Tasmanie au cap Horn) en 8 jours 19 heures 07 minutes, soit 59 minutes supplémentaires sur le temps de référence sur Orange 2 en 2005 (8j 18h 08′).

Mais il reste encore 7 000 milles à parcourir jusqu’à la ligne d’arrivée à Ouessant : Bruno Peyron et son équipage avaient mis plus de dix-huit jours pour remonter l’Atlantique. Et même si Groupama 3 possède encore des milles d’avance sur le temps de référence, il devrait perdre une grosse partie de ce décalage positif dans les jours qui viennent. Les vents contraires qui règnent le long de la côte Est de la Patagonie vont sérieusement entamer le capital du trimaran géant.

Car si le catamaran détenteur du record sur le Trophée Jules Verne avait effectué une superbe remontée jusqu’à l’équateur (8j 05h 36′), il avait en revanche peiné pour rallier Ouessant à partir de la ligne de changement d’hémisphère (9j 11h 15′). Groupama 3 reste dans le timing pour améliorer le record du tour du monde : cinquante jours reste un objectif accessible…

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Carnet de bord de Thomas Coville

blog_coville_portrait.jpgJe sais, je ne suis pas très bavard, je le reconnais. Je ne pensais pas être aussi en retrait par rapport à l’écriture. Pourtant le rythme des quarts permet de dormir, de se restaurer et d’être assez frais et lucide tout le temps, en comparaison à mon dernier tour, où au contraire s’adapter était le maître mot.Nous approchons du Cap Horn, rocher mythique s’il en est, et ces dernières heures avant ce passage sont pour moi sans doute les meilleures.Depuis quelques jours, nous contournons une dépression assez nord qui nous a obligés à faire beaucoup de distance par rapport à l’orthodromie.Nous n’avons jamais cessé de pousser le bateau et nous sommes tous conscients de l’enjeu que représente cet investissement humain pour la suite et notre résultat final. Les conditions de vie sont parfois rendues difficiles par l’état de la mer ou par le froid, l’humidité, l’ergonomie un peu précaire du bord. Vivre à bord prend alors tout son sens. Nous sommes dix dans ce boyau de carbone, guitare de vitesse, qui vibre et retranscrit chaque choc avec l’eau. Vous racontez comment on vit, mange, dort, se vêt, se dévêt ne présente aucun intérêt à mes yeux et ressemblerait vite à une complainte alors que cette simplicité de vie me ravit et au pire m’indiffère. Vous décrire comment faire avancer une telle machine deviendrait vite très technique. C’est pourtant souvent notre seule préoccupation. Nous sommes tous passionnés de vitesse et de technique et nos discussions tournent vite à l’obsession : comment peut on aller encore plus vite ?Pourtant ce qui me plait, c’est de voir comment dans ces conditions aussi inhabituelles, où dix individus aussi différents que nous le sommes, cohabitent et construisent une histoire. Une histoire qui est le suc de ce que je suis venu chercher en équipage dans cette région du monde inhospitalière, où nous ne sommes que tout juste tolérés.A terre ma vision de l’autre, des autres et leur relation n’est pas toujours très optimiste. L’actualité, le monde qui m’entoure me rapproche de réflexions parfois même un peu noires où l’histoire n’est qu’un éternel recommencement. Les Nietzsche, Sartre, Finkielkraut et compagnie ont beau jeu de nous décrire l’Histoire et de nous y enfoncer les épaules.J’ai besoin de ces escapades pour recréer ces huis clos et comprendre, vivre et croire que même dans des conditions d’un exercice difficile, avec des individus complexes et très différents, des réalisations sont possibles et que le meilleur ressort alors.

Cet équipage de Groupama 3 est sans doute un des meilleurs techniquement que j’ai jamais eu la chance de connaître et pourtant chacun d’entre nous, par son histoire et sa personnalité, est une source complexe de contradictions et de sensibilité. La combinaison factorielle de nous dix est une véritable bombe d’énergie humaine et pourtant ça marche. Je vous mentirais si je ne vous disais pas que ça accroche, froisse ou même bloque par moment ; mais c’est là l’intérêt. L’objectif et la finalité lorsqu’ils sont partagés et entendus au départ conjuguent et érodent ces moments. Plus que les qualités de chacun, les défauts prennent leur place dans l’alchimie. Il faut que ces défauts ressortent pour que nous grandissions tous. Il faut, comme dans l’exercice du  solitaire, que les circonstances fassent ressortir notre vrai visage. Les masques tombent et la réalité est alors hurlante. Le miroir que reflète l’autre renvoie tout, grossi par ce prisme de l’évènement dans ce contexte où la Nature décide quand et comment. L’égoïste rend altruiste, l’exubérant demande de garder son calme, le taiseux commande le dialogue, le ronchon impose d’être gai …

Vivre ces instants pour comprendre ce que l’on cherche et se rassurer sur le sens du reste. Etre heureux en mer, c’est juste avoir ce privilège en équipage ou seul de remettre en relief tous ces sentiments et ces valeurs simples auxquels on croit.

Le Cap Horn demain fermera une partie de cette histoire. Non que l’objectif soit atteint, ni le voyage terminé bien au contraire. Mais les conditions ne seront plus celles de cette hostilité absolue de ces mers australes. Demain après le Horn, une nouvelle dimension s’ouvrira, peut être encore plus dure que cette étape physique du parcours, celle qui ronge notre siècle : la pression du temps et du chrono. L’érosion du temps qui passe et qui ne se partage jamais et encore moins à dix. Nous verrons alors comment nous résisterons à cette nouvelle épreuve.
En attendant je vais jouir de ces dernières heures, en surfant chaque vague, en scrutant le ciel pour voir les derniers albatros, en vivant pleinement ce moment qui me donne envie d’y croire. A dix ou seul, je suis passé déjà sept fois devant ce grand caillou majestueux. Chaque fois, je l’ai vécu différemment comme si ce cap était le témoin d’histoire d’hommes où l’Histoire ne se répète pas toujours.

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**La parabole chilienne

 

Lionel Lemonchois : « Le vent devrait mollir en arrivant près des côtes chiliennes et la mer devrait aussi se calmer. Les routages changent tous les jours parce que la situation est assez instable : l’évolution semble indiquer une trajectoire vers le Nord-Est, vers les Falkland, contre le vent ! Mais tout ça va se préciser au passage du cap Horn… »

 

03.03.2010

A une journée du Horn

Après la grande courbe sur le 47° Sud des jours précédents, Groupama 3 a entamé sa descente parabolique vers le détroit de Drake en tribord amure à des vitesses raisonnables au vu de l’état de la mer. Le cap Horn devrait être atteint jeudi, dans un vent mollissant, et la suite du programme atlantique est encore incertaine…

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**Carnet de bord de Franck Cammas

blog_cammas_portrait.jpgPas si pacifique !

On m’avait dit : « tu vas voir le pacifique porte bien son nom »…  Tu parles!!! Depuis quatre jours, on navigue dans une mer difficile et torturée par des vents changeants et qui empêche Groupama 3 d’accélérer sans entrer violemment dans des crêtes de vagues escarpées parsemées à la surface de l’océan. Comble de notre frustration, il faut maintenant qu’on fasse un énorme détour sur notre route vers le cap Horn pour éviter de se retrouver dans le secteur dangereux d’une dépression violente qui s’est formée derrière nous. Ah, il faut le mériter ce fameux cap Horn! Et on est en train de manger notre pain noir. Enfin, j’espère!…A bord, on commence à être impatients de voir le célèbre cailloux et attaquer une partie plus stratégique en remontant l’Atlantique en espérant que les conditions deviennent plus favorables à Groupama 3! La vie à bord suit son cours, dans l’inconfort des mouvements brutaux du bateau. Sinon, on en parle entre nous et on a tous des pensées pour les catastrophes au Chili, puis en France, qui nous rappellent que l’on n’est pas grand chose quand la nature se déchaine…Donc respectons là si on ne souhaite pas que des tempêtes exceptionnelles ne deviennent finalement courantes! Et puis, quand on observe le spectacle incroyable de cet océan, si dur mais si attrayant aussi, on souhaite qu’encore beaucoup de génération puissent vivre les moments que nous vivons!

02.03.2010

Le coup du sombrero…

A environ 1 000 milles du cap Horn, les conditions de navigation sont assez sportives avec plus de trente noeuds de secteur Nord-Ouest, mais surtout avec une mer assez chaotique. L’obligation de détourner la route en opérant une courbe qui a fait remonter Groupama 3 sur le 47° Sud, a fait perdre une grande partie de l’avance acquise en milieu d’océan Pacifique.

01.03.2010

Dos rond dans le baston

Groupama 3 est contraint de s’éloigner de la route directe vers le Horn pour contourner une dépression très rapide qui circule sur les Soixantièmes. L’état de la mer rend la vie de Franck Cammas et ses hommes, rude, fatigante et très humide.

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*Carnet de bord de Fred Le Peutrec

blog_lepeutrec_portrait.jpgQuelque part dans le Pacifique…

Au moment où je vous écris, Groupama 3 est plongé en pleine nuit. Il est 10h du matin en France et nous glissons à 30/32 noeuds sous gennaker par une magnifique nuit de pleine lune. Notre navigateur, Stan, me signale que, devant nous, à seulement soixante miles, des icebergs ont été repérés par satellite il y a quelques semaines et leurs positions ne sont évidemment plus exactement les mêmes aujourd’hui. Alors, concentration, vigilance et vive la Lune! Radar en route et les yeux écarquillés nous poursuivons obstinément notre progression vers l’Est/Sud-Est avec en ligne de mire, le Cap Horn. Enfin, le Cap Horn! A l’extrémité sud du continent sud américain, il est le dernier des trois caps qui définissent le parcours du tour du monde. Il est aussi le plus sud et son contournement suppose de plonger vers des latitudes beaucoup plus froides sans avoir trop le choix de notre positionnement dans les dépressions qui, elles aussi, sont forcées de descendre vers le Sud, canalisées par la Cordillère des Andes. A bord, on se prépare tous à des conditions qui vont se dégrader dans les heures qui viennent. Le ciel va se couvrir, le vent va forcir nettement et la mer va grossir, en avant d’une dépression qui doit nous dépasser. Propulsés par cette ultime claque, nous sortirons des océans du sud en enroulant ce cap mythique avec une immense satisfaction, mais aussi avec une pointe de nostalgie pour la « tranche de nav » dont on tournera la page par la même occasion.L’écart avec notre adversaire virtuel, « Orange », sera, alors, sans doute insuffisant pour attaquer la remontée vers Ouessant relâchés et sereins. Mais contourner le Cap Horn nous soulagera et marquera sans doute la fin de la cavalcade ininterrompue entamée, il y a seize jours, à la sortie de l’anticyclone de Sainte Hélène. Et rien que pour ça, ce sera bon!Orange ayant profité de conditions très favorables le long de l’Argentine, il est probable que notre avance actuelle se réduise et qu’ainsi le suspens reste entier.

A suivre…..**************

Carnet de bord de Jacques Caraës

blog_caraes_portrait.jpgSans aucun doute, la partie la plus difficile : le contournement de l’Antarctique.Notre entrée dans le pacifique sud, est rigoureuse ! La température de la mer avoisine les 5 degrés. Notre route nous fait descendre par 55 degrés sud, et le vent de sud ouest a fait descendre la température brutalement. C’est l’heure de doubler l’empilement des dernières polaires sèches.Le quart de pont surveille avec grande impatience la relève par le quart de stand by. Les minutes supplémentaires paraissent une éternité. Le sac de couchage devient le meilleur des refuges et il est parfois douloureux de s’y extraire au milieu de la nuit froide et humide pour remettre de la toile sur le pont.

La fatigue commence à se lire sur les visages, les déplacements sur le pont sont moins rapides, l’humidité est partout et rien ne sèche. La vie à bord est plus difficile, secouée comme dans une machine à laver ! Il faut malgré tout trouver un minimum de sommeil. Les rappels de barre et l’engagement des flotteurs dans la mer sont parfois si violents, qu’il est difficile de se tenir allongé dans les bannettes. Le sommeil est lourdement perturbé pour ne pas dire inexistant. Il faut parfois attendre un empannage qui sera plus favorable à la glisse pour retrouver des conditions acceptables pour s’endormir. Dans ces moments là, le sommeil est profond et propice aux rêves les plus fous… C’est très étonnant, il semblerait qu’en mer, chacun de nous rêve énormément.

Nos efforts sont récompensés puisqu’ à près de 2300 milles du cap Horn, nous avons plus d’une bonne journée d’avance sur Orange 2 ! La cadence est toujours élevée, nous sommes dans une spirale de vitesse. On ne s’en rend plus compte parfois. C’est là qu’il faut rester vigilant car notre accoutumance aux surfs peut nous entrainer à la faute. L’enfilade de l’océan indien et du pacifique sud sur un tel rythme nous use, comme si on était un peu enivrés par la vitesse. Alors attention ! La délivrance par le Cap Horn n’est pas loin, mais pour le moment c’est la nature qui nous commande, et à la moindre faiblesse elle nous croquera.

Carnet de bord de Loïc Le Mignon

blog_lemignon_portrait.jpg2ème partie

… Plus tard, on a eu le dernier obstacle à franchir une dorsale (zone sans Vent) au large des Canaries espagnoles qui sera franchi avec succès grâce à l’investissement de tout l’équipage de Groupama 3.

Cela nous dégage la route des alizées, direction l’Equateur, temps estimé 6 jours  et demi. Au final on aurait pu battre notre propre record de novembre, mais on est resté prendre une douche sous un énorme grain qui nous a collé 5 heures et ne nous a pas permis d’avancer dans la bonne direction au sud.

Sur cette route se sont les premiers courts de repérage des étoiles car on a beau courir les océans beaucoup d’entre nous ne connaissons pas la voute céleste et ses mystères, ses explications. La grande ourse, la polaire, la constellation d’orions, les pléiades, tous ces noms magiques que j’ai eu la chance d’apprendre avec mon père et en famille les soirs d’été, ou avant de renter nous coucher, on passait un peu de temps la tête en l’air, à se faire des torticolis.

Il y a même la planète Mars qui va nous accompagner tout au long du voyage, car, comme les découvreurs avant nous, le ciel étoilé va changer en arrivant dans l’hémisphère sud. Il faut avant tout repérer la croix du sud, comme point de départ pour trouver les autres constellations et c’est là où on continue d’apprendre car ne venant pas souvent chercher mon pain par ici, je connais moins bien ce ciel ! Certains se sont équipés de star-finder (trouveur d’étoile)ce qui rend la tâche des néophytes plus facile, mais on en oublierait presque la course !

Après l’équateur, j’apprécie particulièrement le coin des iles de Fernando de Noronha. En longeant la côte brésilienne, on passe les meilleurs moments sans doute : torse nu, la nuit à la barre, peu de réglage car le vent est stable, la voûte céleste comme plafonnier et la croix du sud comme mire ! Les étoiles filantes nous émerveillent par leurs quantités et leur longévité.

Après c’est là que tout se joue car au niveau de Rio de Janeiro s’il n’y a pas une dépression venue de la Cordillère des Andes qui nous prend sur son porte bagagen on peut dire adieu Berthe(c’est ma tante) ! Elle s’est faite désirer 2 jours de trop à notre goût mais elle est arrivée ! Ca y est, c’est parti pour l’autoroute du grand sud, cap au 90° et route sur l’Afrique du sud !

C’est là où la magie de ces bateaux modernes opère ! On reste devant le phénomène météo en pouvant se déplacer soit un plus bas, soit un peu plus haut suivant la force et la direction que l’on cherche. Bien sur ça s’est refroidi considérablement et les dernières douches ont été prises au 30° sud, car après l’eau et l’air sont trop froids.

Les premiers vols d’albatros (oiseau découvert par Albert Strauss) viennent nous émerveiller, ces oiseaux qui peuvent rester des heures des jours je crois sans battre de l’aile ! Mais nous allons trop vite pour eux ! Ils restent un moment puis s’en vont nous les croiserons tout au long du parcours sud jusqu’ au Cap Horn.

Nous continuons d’avaler les milles à plus de 32 nds de moyenne. L’équipage a le sourire et certains s’amusent même à faire le zébulon sur le trampoline lors des changements de voiles (à 50 ans tout juste ils savent rester jeunes dans leur tête). Le moral est au beau fixe surtout que Stan nous dit que cela s’annonce bien pour le grand sud ! C’est parfait ! « Allez ! Bar des sports ce soir pour fêter cela », annonce Jaco.

C’est là que nos routes se séparent car il faut que je retourne à mes occupations mettre le journalier en place, faire mon quart, et faire un peu aussi les repas, et oui on ne passe pas le clair de notre temps la tête en l’air à discuter ! Le rythme est soutenu : toutes les trois heures, on change de poste, soit sommeil, soit stand-by, soit sur le pont.

Voilà donc… j’espère que cette histoire vous aura plu et que vous aurez ressenti tout le plaisir que j’ai à être en mer. Voir bouger le vent à passer près des îles, naviguer dans les alizés. Toutes ces sensations, ces émotions, et anecdotes qui font que l’on doit toujours essayer de faire quelque chose en s’amusant ou en y prenant du plaisir.

Mais je tiens aussi à préciser que pour moi rien ne serait possible sans avoir l’accord de la maison. Je peux m’appuyer sur une femme exceptionnelle ou parfaite qui gère au mieux tout le quotidien et l’exceptionnel : quand les enfants commencent à pleurer en se mettant dans un coin de la pièce avec la photo du père absent, cela doit être au moins aussi dure à vivre que ce que nous vivons sur l’eau….

Ps : Nous voilà en vue du Cap Horn, c’est encore d’autres histoires en perspective !

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Carnet de bord de Loïc Le Mignon

portrait_lemignon.jpg1ère partie

Je ne sais pas par où commencer tellement on pourrait discuter et bavarder sur ce que nous vivons à bord de Groupama 3 ! Je suis sûr que même en y passant toute la nuit et avec les dix membres de l’équipage, on ne verrait et ne vivrait pas les mêmes choses.
Pour ma part étant le seul permanent, le projet Groupama 3 a commencé il y a 4 ans maintenant, avec la fin de la construction et sortie chantier en juin 2006, puis avec toutes les périodes de découvertes, de préparations et de records.
Je vous épargnerai la litanie des records et des mésaventures du bateau pour revenir sur ce qui nous intéresse : le trophée Jules Verne, hiver 2009 / 2010.

Après le départ de novembre puis la casse au large du Brésil, l’arrêt à Cap-Town en Afrique du sud, le bateau est revenu le 27 décembre à Lorient. A partir de là, a commencé une course contre la montre pour l’équipe technique : remettre le bateau en état pour pouvoir repartir au plus vite… ce qui fut chose faite à partir du 12 janvier il me semble.

Une première fenêtre s’est présentée le 22 janvier avec un retour express de tout l’équipage qui vaquait à ses occupations.
Cette première fenêtre s’est refermée. Mais, comme aujourd’hui, les professionnels peuvent lire la météo jusque 10 jours, c’est sur les conseils du routeur et du navigateur que Franck Cammas a décidé de garder tout le monde en alerte pour la semaine qui suivait.

Cette dernière se déroule sans départ. Mais, alors que l’on pensait passer le week-end en famille, nous voilà assailli par quatre messages au retour de promenade le samedi midi : départ possible demain matin! L’œil de lynx du routeur a repéré une ultime chance de partir car notre stand-by se finissait officiellement la semaine d’après, soit le 5 février.

Une course a alors commencé : finir son sac, gérer la petite fille et la grande, attendre Steve Ravussin qui a sauté dans un avion de Genève, puis direction Brest pour le repas d’équipage et le briefing météo. Le rythme du palpitant était déjà très élevé.

Départ confirmé, on quitte le quai à 9h15, avec toutes les effusions de larmes et les au revoir aux gens prévenus en catastrophe.

Route sur Ouessant par le chenal du Four, on attend 3 heures la rotation du vent de sud ouest à nord ouest, chose faite à 13 heures 55 minutes  TU (à partir de ce moment là, à bord, on ne parle plus que en Temps Universelle, heure de Greenwich).

Franck prend comme d’habitude la barre pour le départ et nous voilà partis ! Les hélicoptères nous disent au revoir ; ce seront les dernières personnes que nous verrons jusque notre retour à Brest.

Quelques heures après, c’est à mon tour de prendre la barre car on a commencé les quarts de trois heures, et c’est là que je me rends compte que cela fait 3 mois que je n’ai pas touché au « cerceau ». Les premières minutes sont déterminantes surtout que l’on a un premier passage dans 12 heures au cap Finisterre, si ça ne passe pas là, on rentre à la maison !

La suite du carnet de bord de Loïc prochainement sur ce blog….

 

Les conditions de navigation vont se durcir

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La trajectoire du trimaran géant a dû s’incurver ce week-end, au fur et à mesure que le vent de secteur Nord-Ouest s’est orienté à l’Ouest, fluctuant entre 20 et 35 noeuds. Franck Cammas et ses hommes n’en ont pas fini avec le mauvais temps qui règne dans cette dernière tranche de Pacifique, mais la sortie des mers du Sud est prévue pour le milieu de la semaine…

Pas le même tempo, pas le même rythme, pas la même ambiance, pas la même musique, même si la moyenne restera toujours comprise entre 27 et 30 noeuds. Plus de froid, plus de mer, plus de dangers (des icebergs à surveiller), plus de manoeuvres, plus d’humidité : Franck Cammas et ses neuf équipiers entrent réellement dans le « pays de l’ombre » !







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