Les personnes lève-tôt
Les chercheurs ont découvert la mutation du gène DEC2 chez ceux qui ont besoin de peu de sommeil.
Une mutation génétique rare explique que certains n’ont besoin que de quatre à six heures de sommeil.
La majorité des gens ont besoin de huit heures de sommeil par nuit. Un petit nombre, sans prendre de café ni d’excitants, se contente de six heures voire quatre heures. Couchés à 22 heures, ils se réveillent frais comme une rose à 4 heures du matin et se mettent au travail pendant que leurs congénères sont encore au fond du lit, pris dans un sommeil irrépressible. Ces lève-tôt qui font l’envie de tous ceux qui déplorent que leurs journées ne sont pas assez longues pour mener à bien leurs projets, sont en fait des mutants. Ils ont une mutation sur un gène (DEC2) que les autres n’ont pas (Science, 14 août 2009).
L’équipe de neurologues dirigée par Ying Hui-fu, de l’université de Californie à San Francisco, a un gros atout pour ses recherches : la banque d’ADN de soixante familles américaines ayant des troubles du sommeil qui ont accepté de leur donner un échantillon sanguin. En 2001 et en 2005, en effet, les chercheurs californiens se sont fait connaître en identifiant une mutation sur un gène (Per2) intervenant dans les cycles du sommeil à l’origine d’un trouble très particulier : le syndrome familial de phase de sommeil avancée (FASPS en anglais). Les personnes atteintes par cette maladie ont une durée de sommeil de huit heures identique à la moyenne des humains, mais celui-ci est complètement décalé dans le temps. En effet, ils se couchent vers 18 heures ou 19 heures et se réveillent à 3 heures ou 4 heures du matin, quand tout le monde dort.
Depuis cette découverte, les chercheurs exploitent les données ADN dont ils disposent. Leur travail progresse à petits pas mais il avance. C’est ainsi qu’ils viennent d’identifier une mutation sur un gène (DEC2) chez une mère de famille et sa fille n’ayant besoin de dormir que six heures par jour. Or, cette mutation n’existe pas chez les cinq autres membres de la même famille qui, eux comme la majorité de la population ont besoin de leurs huit heures dans les bras de Morphée. Le gène DEC2 intervient dans les rythmes circadiens, régulant la division cellulaire qui intervient au moment du sommeil et l’oxygénation.
Un système complexe
La mutation découverte par Ying Hui-fu et son équipe est extrêmement rare. Ils ne l’ont pas retrouvée dans l’ADN de plus de 250 personnes qu’ils ont analysé à cette occasion. Ils ont pourtant pu vérifier son efficacité en introduisant le gène muté chez des souris transgéniques, le meilleur modèle animal pour étudier le sommeil. Ils ont observé que ces souris modifiées dormaient moins et avaient moins besoin de récupérer lorsqu’elles avaient été privées de sommeil. Même chose chez des drosophiles génétiquement modifiées.
«La question de savoir combien on a besoin de sommeil n’a pas seulement un intérêt pratique mais elle nous aidera à mieux comprendre comment fonctionne le sommeil», analyse Mehdi Tafti, de l’université de Lausanne. Le sommeil est, en effet, un système complexe que les chercheurs sont encore loin d’avoir compris. Ils ont surtout beaucoup de mal à démêler les interactions entre les rythmes circadiens, le balancier entre la veille et le sommeil (l’homéostasie), l’environnement et les gènes dont on mesure aujourd’hui encore le rôle clé.(Le Figaro-17.08.09.)
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