« La Fille la plus heureuse du monde »
*pour les Amis du cinéma roumain, des méandres de l’absurde, de l’humour à froid et du macabre miteux, sortez vos carnets pour y inscrire le nom d’un nouveau membre du cénacle de l’enchantement mélancolique. Après les Puiu (La Mort de Dante Lazarescu), Porumboiu (12 h 08 à l’est de Bucarest), Nemescu (California Dreamin‘) et autres Mungiu (4 mois, 3 semaines et 2 jours), voici venir Radu Jude. A 32 ans, ce jeune homme né à Bucarest et formé au cinéma à l’Université des médias, ex-assistant à la réalisation de Cristi Puiu, livre son premier long métrage avec cette réjouissante et antiphrastique Fille la plus heureuse du monde. Cette jeune provinciale s’appelle Délia, elle a 18 printemps, la grâce boulotte et la moue boudeuse, et vient de gagner une magnifique automobile à bas prix de marque française dans un jeu-concours organisé par une enseigne de jus de fruits et de compotes. Lorsque le film commence, elle est précisément en voiture (un break rouge datant de Mathusalem, empuanti par l’essence et le « biocarpet ») avec ses parents pour venir prendre livraison de l’engin dans la capitale. L’instant est solennel, et la famille, qui a glissé dans ses bagages de quoi se mettre sur son trente-et-un après une longue route, est sur les nerfs.On le serait à moins : le cadeau est d’abord une bénédiction pour ces gens qui bouclent difficilement leurs fins de mois, et la gagnante du gros lot est de surcroît dans l’obligation de tourner, au volant de la voiture, une publicité vantant les mérites de la marque organisatrice.Ces deux facteurs mènent de fait à la longue, burlesque et délicieuse catastrophe qui constitue le coeur du film, dès lors que la famille arrive place de l’Université à Bucarest, où sont installés les responsables du concours et l’équipe du film publicitaire. Plusieurs conflits apparaissent alors.
Le premier, venimeux, oppose la jeune fille à ses parents au sujet de la voiture : eux veulent la revendre au titre du sacrifice consenti pour son éducation, elle souhaite l’utiliser pour s’échapper du foyer familial et entreprendre des études à Bucarest. Le deuxième met aux prises le réalisateur du film publicitaire, pseudo-artiste rongeant son frein, avec son commanditaire, responsable du marketing de la marque de soda, qui entend faire respecter un cahier des charges propre à suggérer « une complicité » entre la jeune fille et la bouteille qu’elle tient dans la main.
Une idée de la perfection
Délia doit réciter un texte inepte expliquant qu’elle est « la fille la plus heureuse du monde » tout en buvant des hectolitres de jus d’orange et en souriant bêtement au volant de la voiture. Une certaine idée de la perfection étant visée, cela prendra toute la journée, dans une fébrilité destinée à masquer l’abyssale vacuité de l’opération.
On rit donc douloureusement à ce film d’une prodigue simplicité, qui dépeint sans avoir l’air d’y toucher l’entrée des ex-sociétés communistes dans le royaume enchanté du libéralisme, et plus largement le monde d’aujourd’hui, défini comme un enivrant empire du faux.
On prend aussi beaucoup à coeur le sort de la jeune héroïne, naïvement soumise le jour de sa consécration hédoniste à une double séance de torture caractérisée. Elle qui croyait que le rêve était au bout du chemin, mais ignorait que le chemin ne mène nulle part. (le Monde-15.12.09.)
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» Gamines » : à la recherche du père perdu
**Roxane Monnier, Zoé Duthion et Louise Herrero dans le film français d’Eléonore Faucher, « Gamines ».
Pourquoi ce film-là est il aussi émouvant, plus que tant d’autres longs métrages français qui lui ressemblent ? S’il fallait choisir une réponse (il y en a plusieurs, le cinéma est une affaire compliquée), on retiendrait cette séquence, vers la fin du film, qui oppose trois jeunes actrices, menées par Sylvie Testud, à Marc Barbé. On ne dévoilera pas ce qui se trame autour de cette table de café, même si depuis le début du film, on attend cette confrontation. Mais on peut dire déjà que Marc Barbé est magnifique, de fragilité, de malheur, de désarroi. Cet acteur, on le voit souvent (encore récemment dans Soleil blanc), on fait appel à lui pour sa présence massive, pour son physique tourmenté. Mais rarement pour lui faire jouer la comédie, comme il le fait si bien ici.
C’est sans doute ça qui fait la qualité du second long métrage d’Eléonore Faucher après Brodeuses : une attention aux gens – aux gens qui sont sur l’écran, les personnages ; aux gens qui leur donnent vie, les acteurs. Les gamines du film sont trois petites filles qui grandissent à Lyon, au temps de Roger Gicquel. Leur maman (Amira Casar) est italienne et les élève seule, après avoir divorcé de leur papa français.
Sybille, la fille du milieu, est blonde, en grandissant, elle prendra les traits de Sylvie Testud. C’est elle qui raconte l’histoire de ce petit clan de femmes, qui lutte pour être reconnu au dehors (par les voisins, l’école…) et pour ne pas se faire phagocyter par le grand clan italien, sur lequel règne l’oncle Salvatore (Jean-Pierre Martins, impressionnant de douce brutalité).
Gamines est construit en allers-retours entre l’enfance et l’âge adulte des trois filles, avec comme axe l’absence de ce père, dont on redoute et désire le retour, dont on fantasme les qualités, d’autant plus qu’on n’en entend jamais dire que du mal. Cette histoire ordinaire est traitée avec une attention sensuelle (comme dans Brodeuses, la belle image de Pierre Cottereau va chercher ce qu’il y a de beauté dans la vie de tous les jours) qui la rend immédiate, belle à voir, douce à toucher.(Le Monde-15.12.09.)
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