Varanasi, la cité des Dieux

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Varanasi est un temple. A ciel ouvert, rythmé par les dévotions pratiquées sur les rives du Gange. Délabrée et négligée, l’ancienne Bénarès débute la nouvelle année sans se soucier du temps qui passe.

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* «Kasyam Maranam Mukti»: «La mort à Kashi est libération». Il y a 3000 ans, les textes sacrés ont fait de Varanasi –Kashi est un de ses anciens noms– le saint des saints de l’Inde. Aujourd’hui encore, on vient pour mourir, pour se faire incinérer ou pour se laver dans le Gange afin de se libérer du cycle des réincarnations.Le chemin qui mène au salut, en particulier les ghats, ces marches descendant vers le Gange, est ici peuplé de mendiants. Vieillards malingres, éclopés et jeunes mères portant dans leurs bras leurs enfants en haillons, s’agrippent aux visiteurs. Miséreuse, sale, polluée, délabrée, Varanasi n’en finit pas d’attirer à elles des pèlerins hindous qui fréquentent ses rives et les milliers de temples éparpillés dans la ville. Sur sept kilomètres, plus de quatre-vingts ghats s’enfoncent dans le fleuve sacré. Un enchevêtrement de palais de maharadjahs abandonnés, d’habitations vétustes et de temples éclectiques sert de décor aux ablutions et aux prières.Peuplée de deux millions d’habitants et recevant près de quatre millions de pèlerins par an, Varanasi semble hésiter entre la vie et la mort : agonie de ses édifices et de son fleuve dangereusement pollué d’un côté; force spirituelle extraordinaire nourrie d’incessantes dévotions de l’autre. Les pèlerins viennent ici à la cinquantaine, dans le troisième âge de leur existence dédié au retrait de la vie sociale et à la méditation. Logés dans des dharamsala –ces hébergements sommaires que financèrent les maharadjahs par le passé– ou couchés à même les quais, ils débutent leur rituel près du Gange avant l’aurore. Quelle que soit la saison, même lorsque le thermomètre avoisine les 0°C, les hommes, torses nus, leur sarong noué autour de la taille, effectuent cinq ou sept brasses et se frictionnent vigoureusement la tête. Rapidement l’eau devient profonde, les marches sont glissantes: on déplore chaque année une cinquantaine de noyades.

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Pourquoi Varanasi est-elle si sacrée? «C’est la question, la plus difficile qui soit», explique le Professeur Veer Badra Mishra, grand prêtre du temple de Sankat Mochan et créateur de la fondation du Gange éponyme. Faisant référence aux textes sacrés de l’hindouisme, il poursuit cependant: «nous sommes dans un lieu doublement “auspicieux”. La maison de Shiva est à Kailash, dans l’Himalaya, mais son siège est à Varanasi. C’est également ici que coule le Gange, le fleuve sacré de Shiva, celui qu’elle a porté sur sa tête car il était trop lourd pour rejoindre la terre sans l’aide d’une divinité.» La cité serait une des plus veilles du monde. Elle fut détruite et pillée par les musulmans, notamment par Aurangzeb, sixième souverain moghol qui rasa Vishwanath au XVIIe siècle, le temple le plus sacré de Shiva, pour y ériger la mosquée Gyanwapi. Reconstruit, le temple à la coupole recouverte d’or est toujours le plus important de Varanasi. Caché au cœur du lacis de ruelles qui forment la vieille ville, il est accessible aux hindous uniquement. Dans cette ville sainte, chaque petit morceau de rue est intimement lié à la religion. Si l’on s’enfonce dans la cité, les minuscules boutiques logées dans une pièce ouvrant sur la rue débordent de poudres de bois de santal et de combustibles naturels pour les crémations ainsi que de fleurs, lampes à huile, pichets en cuivre, pots de terre, noix de coco et bougies; autant d’ingrédients et d’ustensiles pour pratiquer les rituels au bord du fleuve et dans les temples.
Des temples, il y en a partout: privés, à l’intérieur des maisons, publics au milieu des bazars animés, petites niches colorées signalées par un drapeau, minuscules autels sur la marche d’un ghat ou imposants bâtiments dissimulés derrière une lourde porte au détour d’un passage. Ceux dédiés à Shiva, le dieu destructeur et viril indissociable de la Création, comportent toujours un lingam, une pierre dressée à la forme phallique au-dessus de laquelle une jarre contenant l’eau du Gange délivre un précieux goutte à goutte. Des vaches errent souverainement dans le dédale de ces rues, poussant parfois jusque sur les quais, où elles se nourrissent des ordures amoncelées. Sacrées, elles forcent le respect. Les chiens vagabonds ou les singes voleurs qui grimpent sur les temples reçoivent, eux, des jets de pierre lorsqu’ils s’approchent de trop près des offrandes et de la nourriture.
Secte cannibale
La puissance spirituelle de la ville a naturellement attiré des sectes religieuses. Parmi elles, le groupe secret des Aghori se distingue: ces shivaïtes n’opèrent pas de discrimination par les castes, consomment de l’alcool et acceptent toutes les nourritures, y compris les restes humains. Lors de leurs rares sorties, leurs membres vêtus de noir demandent l’aumône dans des crânes humains.
Retour sur les berges. La fumée et les bûches sur les ghats de Manikarnika et de Harischandra révèlent leur macabre activité. C’est ici que se déroulent les crémations qui obéissent à des règles bien précises. L’assistance est toujours masculine. Les enfants de moins de 10 ans, les femmes enceintes, les personnes décédées d’une piqûre de serpent, de la lèpre (maladie considérée comme une malédiction) ainsi que les sadhus (parce que saints hommes) ne sont jamais incinérés. Le corps du défunt, transporté sur un brancard recouvert de tissus dorés, est immergé dans le Gange avant d’être déposé sur le bûcher. Une fois le bois consumé, le fils aîné de la famille, rasé et vêtu de blanc en signe de deuil, jette les cendres dans le fleuve; le défunt rejoignant ainsi les cinq éléments. Il n’est pas rare de voir flotter un cadavre à moitié brûlé à la surface de l’eau, car seules les familles aisées peuvent payer suffisamment de bois de santal pour permettre une incinération totale (environ 7000 roupies soit une centaine d’euros). Pour les plus modestes et afin de limiter la pollution du fleuve, la ville a fait construire des incinérateurs électriques dont un occupe désormais le ghat de Harischandra. A Varanasi, les crémations ne s’arrêtent jamais: c’est la seule ville où elles sont autorisées après le coucher du soleil, et leurs flammes éclairent en permanence la nuit indienne.
Quelques centaines de mètres plus loin, une fois quittés, les quais et les ruelles tortueuses de la vieille ville, retour dans l’Inde moderne, où la fièvre religieuse cède le pas à l’hystérie urbaine; où les cyclo pousses, les voitures, les auto-rickshawsn et les motos se disputent à une foule humaine, dessinant une ville brouillonne et chaotique, bruyante et grouillante. Un concentré de la folie des cités indiennes, surpeuplées et encombrées. Le salut ? Se réfugier, une fois encore, dans un temple. Car ici plus que partout ailleurs, la religion semble être la seule façon d’échapper au tourbillon de la vie. (Libération- voyage)


 

4 réponses à “Varanasi, la cité des Dieux”

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